La vente aux enchères de pétrole du Congo permet de forer dans des terres protégées

Récemment, le gouvernement de la République démocratique du Congo (RDC) a décidé de mettre aux enchères 30 blocs de forage pétrolier et gazier dans la forêt du bassin du Congo, y compris des zones qui s’aventurent dans le parc national des Virunga. Cette décision intervient huit mois seulement après que le gouvernement a signé un accord de 500 millions de dollars pour protéger le bassin, ce qui a provoqué des protestations de la part des habitants locaux et des communautés internationales. Le président affirme que la vente aux enchères de pétrole congolais est nécessaire pour atténuer l’extrême pauvreté de la RDC, mais les militants affirment que l’impact environnemental du forage dépasse de loin les avantages.

Comment le forage est nocif

Les experts en environnement préviennent que le forage aura de graves répercussions sur l’environnement. Premièrement, la forêt du bassin du Congo comprend les tourbières de la Cuvette Centrale, la plus grande tourbière tropicale au monde qui stocke l’équivalent de 15 ans d’émissions de carbone des États-Unis. Si la vente aux enchères du pétrole congolais se poursuit, d’énormes quantités de carbone seront libérées et pourraient devenir le «point de basculement» du climat mondial. De plus, le parc national des Virunga est un site du patrimoine de l’UNESCO qui est l’une des zones les plus biologiquement diversifiées d’Afrique, abritant les derniers gorilles de montagne sur terre. Les experts ont en fait surnommé le bassin du Congo comme « le pire endroit au monde à explorer pour les combustibles fossiles ».

Pilotes pour rompre l’affaire

Il y a huit mois, la RDC a signé un accord de 10 ans pour protéger ses forêts en échange de 500 millions de dollars de promesses internationales. Cependant, depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie et les boycotts qui ont suivi, les prix du pétrole ont monté en flèche. Il s’ensuit que ces prix élevés apportent encore plus de valeur aux blocs pétroliers du Congo. C’est pourquoi huit mois plus tard, le gouvernement a rompu l’accord. Et c’est pourquoi Irene Wabiwa Betoko, responsable de la forêt du bassin du Congo pour Greenpeace Afrique, insiste sur le fait que la RDC « déclare la guerre à notre planète avec le pétrole et le gaz ».

Les critiques africains dénoncent l’hypocrisie occidentale

Bien que l’arrêt de la vente aux enchères de pétrole congolais présente des avantages évidents pour le monde dans son ensemble, les critiques ont également relevé l’hypocrisie de l’Occident sur cette question. Le New York Times commente que de nombreux politiciens des pays africains ont appelé les pays occidentaux pour leur double standard : « Comment les pays occidentaux, qui ont construit leur prospérité sur les combustibles fossiles qui émettent des fumées toxiques qui réchauffent la planète, exigent que l’Afrique renonce à ses réserves de du charbon, du pétrole et du gaz afin de protéger tout le monde ? »

Objectif pour les enchères pétrolières de la RDC : éradiquer la pauvreté

Selon la Banque mondiale, la RDC fait partie des cinq pays les plus pauvres du monde. En 2018, environ 73 % de la population vivait en dessous du seuil de pauvreté. Didier Budimbu, le ministre des hydrocarbures de la RDC, affirme que la rupture de l’accord était nécessaire pour générer des revenus pour le peuple. « Le président, Félix Tshisekedi, a une vision et il veut sortir sa population de la pauvreté », a déclaré Budimbu. Il affirme en outre que bien qu’il ne produise actuellement que 25 000 barils par jour, le Congo a le potentiel de produire jusqu’à un million de barils de pétrole par jour. La production à ce niveau pourrait générer plus de la moitié du PIB du Congo.

Mais où va l’argent ?

Malgré les promesses de réduction de la pauvreté, rien ne garantit que l’argent résultant de la vente aux enchères du pétrole congolais ira au peuple. La majorité des revenus de la RDC provient déjà de l’exploitation minière. Selon Reuters, le Congo produit de grandes quantités de cuivre, de diamants, d’or et de cobalt, mais le pays reste appauvri en raison de la corruption et de l’incompétence politique. Cette situation parallèle soulève des questions sur l’impact réel des forages pétroliers sur l’économie.

Compromis possible

Tosi Mpanu Mpanu, le représentant de la RDC sur les questions climatiques, affirme que le forage pourrait se faire en diagonale pour ne pas perturber la tourbe. Il affirme en outre que tous les forages respecteront les engagements mondiaux en faveur du climat. Mpanu promet de réaliser des examens approfondis pour mesurer les impacts du forage sur l’environnement et les communautés locales. D’autres terres pourraient être mises de côté pour compenser les terres qui seront utilisées pour le forage, fait-il valoir. Enfin, Mpanu suggère qu’en autorisant l’extraction de minerais tels que le cobalt et le lithium utilisés pour développer l’énergie verte, la RDC a «payé sa contribution au changement climatique».

Il y a également des indications que la participation aux enchères pétrolières pourrait être en déclin. Ève Bazaiba, ministre de l’Environnement de la RDC, a exprimé sa volonté de renoncer à la vente aux enchères si le soutien international fournit une source alternative de revenus. Le géant pétrolier français TotalEnergies a également déclaré qu’il n’avait pas l’intention de soumissionner aux enchères congolaises.

Ainsi, au fur et à mesure que la vente aux enchères se déroule, il peut y avoir des moyens de réduire simultanément l’impact environnemental négatif et de lutter contre la grande pauvreté du Congo. Quoi qu’il en soit, la vente aux enchères de pétrole de la RDC souligne la complexité de la protection de la terre et des personnes qui y vivent.

-Émilie Zhang
Photo : Flickr

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